Hierba Buena: tisanes artisanales, locales et zéro déchet

Automne 2019

Convaincue des effets bénéfiques de l’usage des plantes dans la vie quotidienne, Emilia Farfan a fondé Hierba Buena Tisanes. Sa mission: remettre au goût du jour les multiples usages des plantes médicinales, aromatiques et sauvages et partager les savoir-faire liés à cette pratique. Cultivées à Anderlecht, les tisanes artisanales de Hierba Buena sont aussi zéro déchet car elles sont proposées en bocal consigné. Nous avons discuté avec Emilia sur le besoin de revenir au champ et de “mettre les mains dans la terre”, et comment son projet favorise le partage de savoir-faire. Entretien.


Automne 2019

Comment est né Hierba Buena?

Dans une démarche d’amélioration de la qualité de mon alimentation, j’ai décidé de cultiver mes propres légumes. Assez vite j’ai trouvé un petit potager au jardin participatif d'Etterbeek. J'aimais être au contact de la terre mais j’avais besoin me former. 

Cette activité a généré chez moi une conscientisation plus forte du respect de la nature et de la terre. Souvent, quand on me demande par où commencer dans le changement de comportement vis-à-vis de l'environnement, je conseille de se mettre à cultiver un potager. Qu’il s’agisse d’un plant de tomate ou d’une salade on se rend compte assez vite que ce qu’on met sur la terre va être absorbé par les plantes. Et comme cette plante a pris énormément de temps et d’énergie pour pousser, on ne voudra pas la gaspiller. De plus, ça nous amène à revoir notre consommation d’eau.

Je suis convaincue que pour vraiment faire réfléchir les gens sur leur consommation, il faudrait leur donner une graine et les encourager à cultiver leurs propres légumes.

Dans ma recherche de formation, je suis tombée sur un cours de culture des plantes aromatiques et médicinales à la ferme urbaine de Neder-over-Heembeek donné par Christie Michel qui est la fondatrice de Les Herbes de Bruxelles. Et ça a changé ma vie! Après une autre formation en animation j'ai décidé de chercher un terrain pour me lancer.

En février 2019, j'ai eu la chance de trouver une place sur ce terrain à Anderlecht où nous sommes plusieurs projets gérés par des filles. L'union fait la force!

 Tu as aussi fait appel au crowdfunding pour financer une partie de ton projet, n’est-ce pas? 

Oui! Je l’ai fait pour pouvoir financer un vélo électrique qui me permet de me déplacer et de faire mes livraison de tisanes en bocaux en verre qui sont un peu lourds. L'idée est de mettre en place un système de consigne pour aller plus loin dans la démarche durable du projet.

Je participe à beaucoup d'événements pour sensibiliser le public, c'est un des objectif de Hierba Buena. Revaloriser les plantes médicinales, les aromatiques et les plantes sauvages et leurs usages. Et depuis quelques mois je fais des marchés pour vendre mes tisanes.

 Quels différents usages peut-on attribuer aux plantes ?

Les plantes ne sont pas seulement bonnes pour faciliter la digestion ou nous aider à nous endormir. Il faut se rappeler que depuis la nuit des temps, nous nous servons des plantes pour une variété de choses différentes: pour créer des parfums, pour fabriquer des tissus, de la corde, des encres, etc. Nous pouvons nous servir également des qualités des plantes dans notre potager: elles servent à soigner d’autres plantes avec les purins, les décoctions ou les tisanes.

On parle souvent du but médicinal des plantes mais j'aime rappeler l'utilisation qu'on peut en faire dans d’autres domaines. Par exemple, en brûlant certaines plantes, leur fumée éloigne les insectes. Il y a une variété énorme de plantes qui servent à faire des produits d’hygiène. Dans l'utilitaire, on peut aussi se servir des plantes, pour teindre des tissus ou faire du papier. Mon idée est de mettre à jour tous ces usages.

Comment se passe la culture et la récolte chez Hierba Buena?

Elles se font au rythme des saisons! Je cultive une vingtaine de plantes médicinales et aromatiques et je vais ramasser dans la nature une dizaine de plantes sauvages. Les premières cueillettes sauvages débutent en février et je prépare les semis fin février, début mars. La récolte se fera ensuite pendant l'été en juillet, août et septembre.

Quelle est la différence entre un purin et une décoction?

Pour faire du purin, il faut mettre la plante à fermenter pour en tirer ses propriétés bénéfiques tandis que pour la décoction on fait bouillir la plante. Il faut donc s’en servir plus vite, les décoctions ne se conservent pas longtemps.

Est-ce que tu travailles avec beaucoup de plantes indigènes?

Oui au maximum mais je me sers également de plantes européennes. J'ai de la sauge, du thym et du romarin qui sont des plantes méditerranéennes. Mais j'ai du serpolet qui est une plante sauvage indigène et qui est l'équivalent du thym vulgaris, originaire de France. Autre exemple: la marjolaine qui est l’équivalent de l'origan. 

L'idée est de trouver un maximum de plantes indigènes ou leur équivalent. 

Quel est ton lieu de prédilection pour tes récoltes de plantes sauvages?

Tout près de mon champ il y a beaucoup de diversité. Et je profite également des visites chez ma belle-famille en Gaume. Je fais des promenades et je trouve toujours ce qu'il me faut. Mais il faut effectivement faire attention à l’endroit où l’on récolte, c'est une des règles de base de la cueillette sauvage. La plante ne doit pas être directement exposée en bord de route ou d’une autre source de pollution.

Est-ce que tu as une plante favorite?

J'adore la verveine citronnée, elle n'est pas indigène, elle vient d’Amérique Latine. Elle me rappelle chez moi, ma famille, mon pays et mon peuple, la ville et ses parfums. Ici elle se plaît bien en serre mais pour le moment je teste avec une trentaine de plantes en dehors de la serre pour voir comment elles passent l'hiver et comment elles s'y adaptent. La verveine a un arôme très agréable donc elle peut être mélangée à d'autres plantes qui n'ont pas bon goût, elle aide à les faire passer.

As-tu un projet alternatif à Bruxelles à partager avec nous?

Il y en a tellement! Je suis pour tous ces projets qui sont contre le gaspillage alimentaire. Je viens de découvrir un projet qui s’appelle MOLLEKE qui est un lieu d'échange et d'apprentissage qui a pour mission de sensibiliser le public à la transition écologique, à une meilleure consommation et à un mode de vie responsable envers l'environnement à travers des ateliers et des conférences. C’est top!


 

Photos: Agustina Peluffo