La Fédération des Récupérathèques

Hiver 2020

Une Récupérathèque est un magasin collaboratif de matériaux de réemploi au sein d’une école de création fonctionnant avec sa propre monnaie et visant à favoriser la durabilité, la solidarité, et la création de lien social. LA FÉDÉRATION DES RÉCUPÉRATHÈQUES est un mouvement en pleine expansion qui promeut le réemploi en école de création de France et de Belgique. En quelques chiffres la Fédération c’est 12 Récupérathèques établies, 11 autres en construction, 3000 étudiants pouvant profiter d’une Récupérathèque, 8 tonnes de déchets épargnés par an!  


Qu'est-ce qui a déclenché la création de la toute première récupérathèque aux Beaux-Arts de Lyon? 

Le projet est né dans la tête d’Esther Coillet-Matillon et d’Olivier Milis suite à 2 grands constats. Premièrement, les études d’art coûtent cher, et les étudiants ont souvent des difficultés économiques. Deuxièmement, ces écoles sont le théâtre d’un gaspillage régulier: en effet, les matériaux sont utilisés pour des travaux ou activités souvent éphémères, et finissent la plupart du temps au rebut plutôt que d’être revalorisés pour leur donner une seconde vie. 

L’idée d’Olivier Milis et d’Esther Coillet-Matillon fut dès lors de créer le chaînon manquant entre le moment où les étudiants n’avaient plus besoin d’un matériau et le moment où il allait finir à la benne. Vu l’envergure d’un tel projet, il fallait trouver un moyen de rassembler les énergies requises pour le mener à bien. La solution leur sauta bientôt aux yeux : ils décidèrent d’y adosser une monnaie locale. Pour acquérir des matériaux, les étudiants doivent acquérir de la monnaie locale, soit en travaillant pour le magasin soit en apportant des matériaux que le magasin leur rachète. En outre, cette monnaie locale a pour avantage de redonner de la valeur aux matériaux (qui ne sont plus considérés comme de simples déchets) et mettre tous les étudiants sur un pied d’égalité (la monnaie n’est en effet pas convertible en euro).Hiver 2020

Quels sont leurs retours? En quoi cela est-il avantageux pour eux?

Les étudiants sont très enthousiastes; premièrement parce qu’on leur offre un espace de liberté dans l’école, un lieu qu’ils gèrent comme bon leur semble. Deuxièmement, ce magasin leur permet de faire des économies qui peuvent être assez conséquentes s’ils vont souvent à la Récupérathèque. Une année, une étudiante a économisé jusqu’à 8 000 € en grâce à ce Récupérathèque. Très rapidement, c’est un service dont les étudiants ne peuvent plus se passer. 

Est-il possible de quantifier l'impact environnemental d'un tel projet?

C’est assez difficile, car ça peut varier fortement d’une école à l’autre en fonction des besoins en matériaux de l’école et du degré d’utilisation de la Récupérathèque. Mais nous avons pu estimer que dans une école qui génère 10 bennes de 20 m³ par an, une économie de 2 bennes de 20 m³ peut être réalisée si le projet est bien mené.

Sur votre site, vous parlez de création de lien social, peux-tu m'en dire plus?

Dans les écoles de création, le travail demandé aux étudiants est souvent très important, car en plus des cours théoriques ils ont des cours pratiques très chronophage. Par conséquent, le temps de la rencontre et de l’échange avec d’autres étudiants de l’école et souvent négligé. De plus, il y a peu d’espace de rencontre, temporelle comme physique, et chacun reste dans sa pratique très prenante sans s’ouvrir aux autres disciplines enseignées dans l’école.  

La Récupérathèque est un lieu de vie, de rencontres. Tous les étudiants viennent s’y inspirer pour leurs projets et finissent par discuter de leur pratique avec un inconnu de l’école qui lui apportera des connaissances propres à sa propre pratique.

Hiver 2020

Comment vois-tu le projet évoluer? Quels sont vos objectifs?

Le projet évolue et s'enrichit de chaque Récupérathèques présentes dans le réseau de la Fédération. Ce sont l’évolution des Récupérathèques qui nous dira comment faire évoluer le projet. 

Nos objectifs à la Fédération des Récupérathèques sont d’essaimer le projet dans les écoles de création, accompagner et lier les Récupérathèques.

chaque année, la Fédération organise une Rencontre entre toutes les Récupérathèques (ROAR), qui permet aux étudiants d'échanger des bonnes pratiques, de rencontrer d’autres personnes animées par les mêmes valeurs et d’en apprendre plus sur les enjeux du réemploi et l’organisation d’une Récupérathèque. 

Cette année, la Fédération accompagne le lancement de plusieurs Récupérathèques, notamment un projet en faculté d’architecture à l’Université Libre de Bruxelles et une autre à l’École Supérieure des Arts Saint-Luc Bruxelles. L'objectif est de leur fournir les outils essentiels pour que le projet puisse voir le jour rapidement et assurer sa pérennité. La Fédération réalise également des suivis ponctuels pour les récupérathèques existantes qui en éprouvent le besoin. 

Enfin, la Fédération veut offrir des outils aux récupérathèques pour leur simplifier leur gestion quotidienne, notamment avec une web app conçue spécialement pour faciliter l’encodage de matériaux et générer automatiquement un catalogue en ligne permettant aux récupérathèques de promouvoir leur stock auprès de leur public cible et de créer du lien entre les Récupérathèques d’une même agglomération.

Pour contacter la Fédération des Récupérathèques: federation@recuperatheque.org


 

Illustrations: Sarah Cheveau