C’est après des expériences dans le milieu de la restauration et en voyant l’abondance de déchets qui y étaient créés que Sandrine et Victoria décident de lancer le Boentje Café, le premier café zéro déchet de la capitale. Plus facile qu’il n’y paraît, ouvrir un café zéro déchet demande surtout un peu de bon sens et beaucoup de créativité! Rencontre.
Pourquoi « Boentje » ?
Boentje c'est du bruxellois, ça veut dire « coup de coeur ». On voulait refléter l'aspect local de l'endroit de par la nourriture qu'on propose mais on voulait aussi avoir une réelle empreinte bruxelloise. Dans le mot « Boentje » il y a ce côté plein d'amour, le contact avec la clientèle est super important pour nous, on veut vraiment que les gens se sentent bien ! Par après on a découvert que ce mot vient de « boon » en néerlandais qui signifie la graine, le grain, comme le grain de café, tout est lié !
Comment fonctionne un café zéro déchet ?
Tout d’abord, toute la déco a été créée à partir de matériaux de récupération.
Ensuite, tous les petits objets qui sont habituellement jetables dans cafés, comme les pailles, les serviettes, les tasses des cafés à emporter, sont ici zéro déchet : on fait les cafés à emporter dans des bocaux, on a des serviettes en tissus, les pailles sont en inox.
Toutes les salades à emporter sont dans des bocaux qui sont consignés. On offre aussi une réduction aux personnes qui viennent avec leur propre contenant. On encourage cette démarche pour qu’elle se standardise.
On organise également des ateliers autour du zéro déchet au sens large. Il y a des ateliers tricot par exemple qui pour nous sont dans la veine du zéro déchet parce que tricoter son pull permet de ne pas aller en acheter un en grande surface. Il y a aussi des ateliers de transformation d'objets, de savoir-faire.
Tout ça c'est pour la partie que le client voit. En interne on a mis en place tout un système avec nos fournisseurs. Notre livreur de lait par exemple, fonctionne avec des bouteilles en verre consignées. Notre torréfacteur fonctionne de la même manière. Pour le poulet on réussi à faire la même chose. Pour les fruits et légumes ce n'est pas très compliqué parce qu'ils sont souvent livrés dans des bacs consignés. On travaille avec des produits locaux et de saison car les produits qui viennent de loin sont souvent emballés. Au niveau de notre cuisine on essaye d'utiliser le produit dans son intégralité, aujourd'hui on a une recette faite à partir de fanes de radis. On a aussi développé des recettes de cookies et de gâteaux qui permettent d'utiliser le vieux pain. On a également un compost qui permet de diminuer drastiquement les poubelles.
A-t-il été facile de trouver les fournisseurs acceptant de travailler selon la démarche zéro déchet ?
Ça dépend, pour l'instant il y en a qui sont encore en test. Une technique qu'on a utilisée qui nous a été utile était de regarder les gasap du coin, et de regarder qui sont les fournisseurs de ces endroits-là et de se dire que cette personne va de toute façon à Bruxelles pour faire une livraison et donc de lui demander de faire un crochet par chez nous et ensuite de s'organiser pour les consignes. Cela nous a permis de trouver notre laitier qui nous a dit que ça l'arrangeait car de cette de manière il fait des économies.
Cette façon de faire nous oblige à travailler avec des petits acteurs parce qu'il est clair que ce n'est pas possible de faire plier de grosses entreprises.
Notre café a ouvert aussi à un moment où de plus en plus d'acteurs prennent conscience qu'une fois que la logistique est mise en place ce n'est pas très compliqué, ça peut être moins cher aussi.
Toutefois, il y a certains produits qui n’existent pas encore en zéro déchet, comme les laits végétaux par exemple. Il est possible de les faire soi-même mais on n'a pas encore eu l'occasion de le tester ici et de le faire mousser ensuite.
Les choses se font petit à petits. Au début on faisait les fonds de nos cheesecakes avec des spéculoos qu'on achetait emballés et maintenant on s'est tournées vers Generous qui est une marque de biscuits bio qui nous vend ses chutes de spéculoos.
Voyez-vous vraiment la différence de quantité de déchets par rapport à celle de votre ouverture en décembre ?
C'est dur de comparer parce qu'en décembre on avait peut-être plus de choses avec des emballages mais on avait aussi moins de clients.
Mais dans tous les cas, on n'a pas augmenté nos poubelles, on est toujours à une poubelle toute les deux semaines. On en est super contentes.
Au début c'était frustrant parce qu'on voyait les déchets qu'on avait encore et on a décidé de les éliminer au fur et à mesure. C'est d'autant plus motivant parce que petit à petit on se rend compte qu'on peut faire moins de déchets sur tel ou tel aliment.
Le mode de vie zéro déchet vous a sûrement encouragé à apprendre plein de nouvelles manières de faire. Vous parliez de tenter des recettes de laits végétaux, y a-t-il d'autres choses que vous êtes en train de tester ?
On a appris à faire du paneer ! Comme on utilise du lait qui n'est pas UHT qui a donc a une durée de conservation d'une semaine, il faut faire attention aux quantités qu'on a parce que si on en n'a pas assez on doit passer à des briques de lait et si on en a trop il ne se conserve pas. Donc on fait du fromage avec, c'est quelque chose qu'on a découvert ici. On a appris également à cuisiner des cookies à base de farine de pain. Quand on a un déchet qui nous reste on se demande ce qu'on pourrait en faire et c'est comme ça qu'on cherche de nouvelles recettes. On a aussi appris à faire des recettes un peu originales avec les légumes de saison et de les cuisiner de toutes les façons possibles.
Sentiez-vous que dans le quartier il y avait une demande pour ce genre d'initiative ?
Oui ! Il y avait plusieurs demandes différentes. Il y avait les gens qui cherchaient un endroit où boire un café et manger sain. Il y aussi une grosse communauté zéro déchet sur Schaerbeek qui était assez contente de notre ouverture. On a maintenant beaucoup d'habitués et c'est chouette, c'est ce qu'on voulait.
Avez-vous un idéal vers lequel vous tendez, un projet modèle ?
Notre idéal n'existe pas encore parce que c'est trop tôt ! Mais on aimerait que tous les restaurants fonctionnent de la même manière, que ce ne soit plus une façon de faire marginale. Ça ne devrait pas être une particularité d'être un café zéro déchet.
Par rapport au Boentje café, on aimerait avoir plus de milieux sociaux représentés dans notre clientèle. C'est clair qu'on est dans un endroit super « attrape-bobos » et on aimerait que ça soit ouvert à tous et que plus de gens s'y sentent acceptés. Grâce à un contrat de quartier, on pourrait avoir des sous qui permettraient à certaines personnes d'assister à nos ateliers gratuitement. On ferait rentrer les gens dans le lieu par les ateliers.
Le Boentje Café est ouvert du mercredi au dimanche de 1Oh à 18h.
18 Place Colignon, 1030 Schaerbeek.
Suivez aussi le Boentje Café sur Facebook pour être au courant de toutes leurs activités!
Photos : Louise Devin