On les voit fleurir de plus en plus autour de nous, et pour différentes raisons. Les toitures végétales font le buzz, et pas seulement pour la biodiversité qu’elles accueillent.
Un peu d’Histoire
Les toits végétaux existent depuis longtemps, on pense aux cabanes en Islande ou en Norvège, avec les toits herbeux comme des prairies. Mais plus récemment elles reviennent en force dans les villes et notamment à Bruxelles, un peu moins sauvages, un peu plus organisées et probablement moins verdoyantes que les images qu’on a gardées en tête.
Violette de Greendays nous parle de cette technique, de ses avantages et inconvénients.
Déjà, avant toute considération technique, les toitures végétales ont un effet visuel : elles ramènent de la verdure en ville, et gomment les toits en les verdissant.
Ensuite elles attirent les insectes, qui trouvent des abris et de la nourriture sur ces toits, et par ricochet elles aident à maintenir toute une population de petits oiseaux en ville.
Elles captent les eaux de pluie, réduisent la réflexion du son (dans la rue et dans le bâtiment) et diminuent le taux de poussière en suspension dans l’air.
Et le dernier effet, et pas des moindres, c’est l’effet sur la température environnante : les toitures végétalisées réduisent les variations de température à la fois à l’intérieur et à l’extérieur, et principalement sur le chaud : une étude allemande* a mis en évidence que par une belle journée à 30°c, la température d’un roofing classique pouvait monter jusqu’à 80°c, tandis qu’un toit végétalisé resterait autour de 25°c.
Mais bon, c’est compliqué à mettre en place non?
il y a 3 types de toitures végétalisées
- extensives , semi intensives et intensives
La plus courante c’est l’extensive : toits plats, avec orpins (alias sédum, les petites plantes grasses qui poussent aussi dans les creux des vieux murs), 13 cm de hauteur de terre, le classique qu’on voit sur les toits des parkings ou des grands bâtiments publics.
Le moins cher à installer et le plus facile d’entretien.
Les semi intensives et intensives : entre 20 et 40 cm / toitures jardin (comme le toit de l’Albertine) sont plus rares car plus chères, plus lourdes et demandent un peu plus d’entretien. Par contre elles ont un plus grand effet sur l’environnement car elles capturent plus d’eau de pluie, sont plus insonorisantes, abritent plus de biodiversité et peuvent même produire des plantes et légumes pour la consommation humaine. Le Delhaize de Bondael a installé un toit potager sur ses 300m² de toiture et arrive à produire 2 tonnes de légumes par an.
Concrètement
Les toitures peuvent être plates ou légèrement inclinées, on oubliera pour les maisons classiques bruxelloises.
D’abord : préparer son toit
attention, il faut faire une étude de faisabilité : est ce que la structure du bâtiment peut supporter 1 toit végétal? (au minimum 60kg/m² contre 30kg/m² pour des tuiles classiques)
Ensuite : étanchéifier son toit (roofing/baches plastiques) (sur un toit incliné le toit végétal vient remplacer les tuiles, donc permet de réduire les dépenses)
Puis : installer des plantes
garnir le toit
-1 on met des alvéoles, qu’on rempli de terre légère ou de laine de roche (encore + léger, mais pas naturel), puis on vient piquer les bébé-plantes dedans
-2 on vient fixer des bacs préremplis de terre et de plantes (comme un légo)
-3 on rempli le toit de terre et on repique les plantes à la main
Après : entretenir son toit
c’est végétal, c’est vivant!
Il faut penser à apporter de l’engrais de temps en temps (environ 2 fois/an) et à arroser son toit végétal lorsqu’il fait très chaud. De manière générale, les toitures végétalisées craignent plus le chaud que le froid.
le conseil de Violette : observer son toit au moins 1 fois par mois, regarder si des parties jaunissent ou rougissent, l’arroser au besoin : en été un peu plus qu’en hiver, on peut aussi poser un système de goutte-à-goutte (un tuyau finement percé qui fait couler quelques gouttes à la fois sur toute sa longueur). Si on arrose pas, alors la végétation va cuire. Elle peut survivre par endroit et recoloniser les parties du toit où les plantes seront mortes, mais ça va prendre du temps.
Une toiture intensive gardera plus d’humidité qu’un toit extensif, mais les plantes présentes seront aussi plus gourmandes en eau. (et on ne parle pas des toits potagers).
Il faut aussi faire attention aux arbres alentour et aux graines qui pourraient arriver sur le toit. Les érables sont particulièrement coriaces et il faut les retirer rapidement.
Lors de la sélection des plantes pour son toit, il y a plusieurs types de plantes disponibles. Une bonne option est de choisir un mélange de plantes locales, elles seront plus adaptées à leur environnement et vivront plus longtemps.
Attention : toiture végétale et mur végétal sont 2 choses très différentes :
la toiture végétale a un vrai impact environnemental “positif” tandis que le mur est uniquement décoratif (c’est pour le bling). Et au niveau de l’entretien ça sera aussi très différent. Un mur végétal ne recueille pas beaucoup d’eau de pluie naturellement et doit être constamment arrosé, retaillé, regarni, alors qu’une toiture végétale va récupérer beaucoup d’humidité naturellement et va “faire sa vie”
Quels sont les intérêts?
On a parlé de la biodiversité qui grandissait grâce aux toits, et à l’impact visuel au niveau de la ville. Les températures sont modérées, et l’effet d’”ilot de chaleur” est cassé. L’air est plus respirable car les poussières en suspension dans l’air sont captées, et les jours de pluie le ruissellement et les risques de débordement sont réduits.
Autre intérêt : un toit végétal peut être utilisé pour lester les panneaux solaires :
Pour assurer la stabilité des panneaux solaires et pour éviter qu’ils ne s'envolent sous l’effet du vent, on doit les lester, généralement avec des fixations sur le toit ou bien avec des gros blocs de béton. On peut utiliser le poids du toit végétal pour remplacer ces moyens de fixation, surtout sur les toits plats où les panneaux solaires sont surélevés, et où la végétation se développe autour et sous les panneaux. On a alors un lestage naturel et répartit, plutôt que des gros blocs de béton qui sont posés inégalement. Autre effet intéressant : la toiture végétale atténue la température sur le toit, ce qui réduit la surchauffe des panneaux solaires et leur permet de mieux fonctionner (et de nous fournir plus d’électricité).
L’implication publique
Certains pays comme l’Allemagne ont beaucoup développé les toits végétalisés, surtout sur les bâtiments collectifs. En Belgique avec les récentes grosses canicules on y arrive progressivement :
Depuis fin 2023, le règlement d’urbanisme de Bruxelles (RRU) oblige toutes les constructions ou grosses rénovations à végétaliser les toits plats à partir de 20m² (privé ou public)
En Wallonie et à Bruxelles il y a de plus en plus d’aides pour la mise en place de toits végétalisés, tant au niveau de la région que des communes et c’est intéressant de bien se renseigner à ce niveau.
Le coût initial d’installation est plus élevé qu’un toit classique, début 2024 on parle de 70€/m² en extensif, mais en fonction des techniques choisies et des aides accordées, la facture peut être réduite pour arriver à des prix plus ou moins comparables, sans compter les économies de chauffage ou de refroidissement qui arrivent après.
On voit aussi que les bâtiments avec des toits végétalisés prennent environ 5% de valeur à la vente.
Si vous êtes intéressé.e.s il existe des entreprises spécialisées qui assurent le suivi après installation : Violette fait partie de Vestaculture - Greendays, ils ont des jardiniers à Bruxelles qui peuvent venir faire l’entretien du toit si ça n’est pas faisable par l’habitant. Elle conseille aussi Upgreen sur Liège.
Un chouette livre pour se renseigner de manière approfondie est “Végétaliser son toit” par Gernot Minke, il est disponible dans la plupart des librairies.
Le site de Bruxelles Environnement est aussi une bonne source d’informations
https://www.guidebatimentdurable.brussels/toiture-verte-extensive
Le prochain point à relier
Violette partage avec nous un autre projet qu’elle trouve très inspirant, et qui mérite effectivement d’être découvert : Le Grand Bois Commun.
A Hennuyère, à quelques pas de Bruxelles, se trouvait une argilière dont l’exploitation a été arrêtée dans les années 70. Depuis 50 ans, petit à petit la forêt s’est réinstallée, reprenant ses droits.
En 2013 le lieu est partiellement classé, en 2019 une poignée de coopérateurs se regroupent pour racheter en commun la partie restante pour la préserver et en faire le grand bois commun, un projet d’écologie du commun où la forêt et sa préservation sont le cœur du projet.
Plus d’informations par ici si vous voulez découvrir le projet
https://www.legrandboiscommun.be/
* BuGG (2020). BuGG-Market Report on Building Greening 2020, Green Roofs, Green Facades and Interior Greening in Germany
Illustrations Karo Pauwels